Sans moi

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Aujourd’hui, tu n’es pas avec moi, tu es avec papa. C’est son tour de garde, comme toujours depuis que nous sommes séparés. Chacun nos journées, comme si on tenait quand même les ficelles de ton éducation, chacun de notre côté.

Aujourd’hui, tu n’es pas là, tu n’es pas avec moi. Plus les années avancent et plus ces journées sans toi sont de plus en plus stressantes. Je sais que tu as besoin de stabilité et j’ai peur, peur que tu n’y arrives pas sans moi.

Une mimique, un son, un regard, je le ressens, je le vis avec toi. Cette façon que tu as de te pencher la tête avant que tout éclate en toi et autour de toi. Sans moi, j’ai peur que tu ne retournes pas facilement au calme, j’ai peur qu’on te juge. Que je ne sois pas là pour défendre ton point de vue que je semble comprendre.

Sans moi, j’ai peur et pourtant je sais que j’ai besoin de ce repos qui, je crois, est mérité.

Tu sais mon cœur, ce serait censé être le contraire, que plus que tu vieillis et plus je serais censée être à l’aise que tu partes ainsi chez papa. Mais c’est tout autrement. Car ton corps vieillit, mais pas ta tête. Celle-ci semble restée prise dans un univers que je ne comprends pas. Ton corps lui, continue de grandir, mais ton cerveau semble être en sabbatique, sans que je ne puisse rien faire.

L’avenir me fait peur, pourras-tu avoir un avenir qui rentre dans la normalité? Cette rage en toi, finira-t-elle par s’estomper? Pourras-tu finir par comprendre que tu es dangereux pour plusieurs autour de toi?

Je te regarde souvent lorsque tu regardes la télévision. À part ces petites mimiques que tu crées avec ton visage et tes mains, souvent, je te regarde et je vois un garçon normal. Un garçon qui veut apprendre et grandir, un garçon qui a le droit de n’être qu’un enfant.

J’aimerais tant que tu comprennes ce que j’essaie de te dire, mais mon cœur, ta tête n’est pas capable de me comprendre pour l’instant. Tu es dans un monde bien à toi. Qui n’est pas le monde que je connais.

Toi, peut-être que tu ne seras jamais capable de connaître notre monde à 100%, mais moi, je te promets d’essayer le plus possible de comprendre le tien.

Lorsque tu tourneras sur toi-même pour que le vent que tu crées t’enlève un peu de ce poids que la vie t’apporte, je tournerai avec toi. Lorsque dans ton monde, tu voudras sentir les nouvelles odeurs pour que ton cerveau comprenne ce qui t’entoure, je t’aiderai à t’en souvenir.

Et lorsque la rage en toi sera trop forte et que tu t’en prendras à toi-même, je te bloquerai et t’aiderai à t’aimer autant que je t’aime.

Et si un jour, ta tête arrête d’évoluer, je prendrai le reste de la mienne pour t’aider à tout de même comprendre un peu.

Tu sais Antoine, aucun diagnostic ne peut te changer, mais saches que si un jour tu trouves ça dur d’être toi, saches que pour moi, de mes yeux, tu es la plus belle chose qui me soit arrivée.

Ensemble, nous finirons par réussir. Car l’amour est plus fort que tout.

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Je suis maman d'un merveilleux garçon qui a un TDAH et un TSA sans déficience intellectuelle. J'ai toujours été sensible à la maladie et aux troubles mentaux, je suis d'ailleurs préposée aux bénéficiaires. Mon fils réussit à faire ressortir le meilleur de moi-même. Le but de mes textes est d'évacuer mais surtout de conscientiser le monde à la différence et aux troubles mentaux ainsi qu'à leurs aspects dans la vie de tous les jours. J'espère vous toucher par mes écrits autant que moi je suis touchée en les écrivant.